Cela faisait quelques jours maintenant que Martin avait reçu une lettre de menace concernant le kidnapping de son boursouflet "fluffy". Et cela faisait encore moins longtemps qu'on lui avait renvoyé la pauvre créature dans deux boites différentes. Martin avait beau être un sacré poltron aux yeux du monde, il avait tout de même cherché le coupable avec acharnement, ce qui n'avait pas plu du tout aux ravisseurs. Depuis, se sentant coupable de la mort tragique de son animal de compagnie, il était resté enfermé chez lui, avait posé un congé sans solde et comptait bien en profiter pour s'en remettre.

Il passait le plus clair de son temps allongé dans son canapé à manger tout ce qui lui tombait sous la main. Il s'était tout de même lavé, mais c'était vraiment parce qu'il ne supportait pas les mauvaises odeurs. Aujourd'hui, sa tenue était des plus simples. Un vieux caleçon large, des chaussettes et un peignoir qu'il ne prenait même pas la peine de fermer.

Arborant une magnifique barbe de trois jours, il avait des cernes incroyables. Il faut dire que, même sans la lettre de menace, il avait tout de même passé trois jours sans dormir à faire des permanences au ministère. Là, il était clairement en burnout total, au bord de la dépression nerveuse.

Il devait être dix ou onze heures lorsqu'il se réveilla se matin là. Qu'avait-il prévu de sa journée ? Absolument rien. Manger, dormir, aller aux toilettes, basta. Mais sa journée ne ressemblerait pas à ça. Non... Au lieu de ça, on frappa à la porte.

Ne prenant même pas la peine de fermer son peignoir, il se hissa en trainant des pieds jusqu'à la porte et l'ouvrit mollement. Face à lui, Abigail, la femme de son chef et ami, Calum, lui faisait face. Poussant un profond soupire, Martin dit, d'une voix digne d'un fantôme.

Oh... Aby... C'est gentil de passer... Laisse moi deviner, c'est Cal qui t'envoie voir si je ne suis pas mort...?

En arrivant au travail, Abigail avait appris que tous ses rendez-vous professionnels de la journée s'étaient annulés les uns après les autres, ce qui ne la mettait pas réellement au chômage technique - il y avait toujours mille dossiers et traités à préparer, gérer, finaliser - mais lui permettait de revoir son emploi du temps de manière beaucoup plus dégagée.
Elle avait décidé d'en profiter pour proposer à Martin, qu'elle n'avait pas vu depuis un moment avec les derniers événements survenus, de déjeuner avec elle. Cal lui avait mentionné que tous les employés du bureau des Aurors avaient reçu des lettres de menaces récemment, et si elle ne s'était pas fait trop de soucis pour son mari, elle s'était un peu inquiétée pour son ami en revanche. Elle l'avait immédiatement imaginé pris de panique, courant dans tous les sens...
Seulement, alors qu'elle se dirigeait vers le Département de la Justice Magique, elle avait croisé le jeune Black, nouvel apprenti de Calum, qui l'avait informée que Martin avait pris un congé de plusieurs jours. Martin, prendre un congé prolongé ? Quelque chose devait clocher sérieusement ! C'est sur un ton moqueur que Black lui avait alors appris pour le pauvre boursouflet de son collègue.

C'est donc ainsi, mue par l'amitié qu'elle portait à l'Auror français, qu'elle avait débarqué à sa porte avec un sachet de croissants à la main : il était dix heures, peut-être n'avait-il pas encore déjeuné étant donné qu'il était en congé ? Et aux dernières nouvelles, il détestait toujours autant le bacon et les haricots comme premier repas de la journée.
Ce fut le fantôme de Martin qui lui ouvrit.

- Oh... Aby... C'est gentil de passer... Laisse moi deviner, c'est Cal qui t'envoie voir si je ne suis pas mort...?

La jeune femme aurait ri, si l'état dans lequel elle venait de trouver son ami ne lui faisait pas de peine. C'était pire que ce qu'elle avait imaginé !

- Cal ? Tu plaisantes ! Il n'est pas aussi bienveillant que ça.

Elle fit un pas en avant, signifiant qu'elle attendait qu'il la laisse entrer, car elle n'avait pas spécialement envie de discuter sur le pas de la porte alors qu'il était dans une tenue pareille !

- A ton service, on m'a dit que tu avais pris congé, alors j'ai décidé de venir voir comment tu allais. Tu me laisses entrer ?

Une fois qu'elle eut passé le seuil de la porte, Abigail se débarrassa de son manteau et s'installa dans le salon sans aucune gêne. Lorsqu'elle avait rencontré cet ami proche de son mari, elle ne s'était pas gênée pour profiter un peu comme tout le monde de son côté bonne poire, mais finalement elle avait développé une réelle amitié pour le sorcier et ne s'en servait plus désormais (du moins, cela s'était réduit au minimum syndical version Aby). Elle le trouvait amusant, parfois même touchant, et il était une source d'informations sur le monde magique français, qui était l'un des pays dont la diplomate était responsable à la Coop'. Quand elle voulait faire enrager Cal, elle parlait à Martin en français devant lui car le chef des Aurors n'en connaissait pas un traître mot.

- Des croissants à la française. dit-elle dans la langue maternelle de Martin en lui tendant le sachet avec un sourire.

Martin laissa entrer Aby bien malgré lui. Il aurait aimé lui dire qu'il préférait rester seul, mais c'était trop tard, elle avait déjà franchit le seuil de la porte. Et puis c'était Martin... Il était incapable de dire non.

Néanmoins, Aby avait un argument de taille et réconfortant, des croissants. Il esquissa quand même un sourire avant de se laisser tomber mollement sur le canapé, son chien venant poser au passage sa tête sur sa cuisse, d'un air compatissant. Martin le caressa sans vraiment s'en rendre compte, se passa ensuite la main dans les cheveux. Il prit ensuite le sac et un petit sourire aux lèvres, il dit dans sa langue natale.

Merci beaucoup...

Il ouvrit le sachet, prit un croissant et eut à peine la force de mordre dedans. La fatigue se lisait sur son visage, c'était presque effrayant.

Excuses moi, Aby... Je ne suis pas au meilleur de ma forme... Je suis si fatigué que je n'arrive pas à dormir... Et puis, à chaque fois que je ferme les yeux je vois... Fluffy coupé en deux.

Passant sa main sur son visage, il regarda la jeune femme d'un air complètement blasé. Avec une déconcertante lucidité, il ajouta.

Je sais pertinemment que tout le monde se moque de moi, au ministère. Mais il faut me comprendre, j'suis tout seul. Mes animaux, c'est toute ma vie, ils sont toujours là pour moi... Ca peut paraître ridicule, mais ça ma réellement touché. Ca plus le fait que je suis toujours le premier à être là pour toutes les missions où il faut des volontaires. Non... J'aurais mieux fait d'accepter les actions que m'a proposé mon père il y a cinq ans dans son entreprise. La vie serait beaucoup plus simple.

S'appuyant dans le fond de son canapé, les yeux dans le vide, il semblait tellement au fond du trou qu'on pouvait être soit touché par ce spectacle... Soit on pouvait avoir envie de lui rentrer dedans.

Abigail ne fut pas plus rassurée par l'état du salon que par celui de Martin. Il n'était pas sale, mais il n'était pas aussi bien rangé que d'habitude, et des paquets de chips, des boites de gâteaux et autres emballages de nourriture divers et variés traînaient ça et là.
Elle prit place à côté de lui sur le canapé et se servit aussi d'un croissant, dans lequel elle croqua bien plus énergiquement que son ami. Ce dernier lui expliqua qu'il n'avait quasiment pas dormi, ce qui n'était pas nécessaire car les valises qu'il avait sous les yeux parlaient pour lui, et mentionna l'image qui le hantait. La diplomate ne rit pas, même s'il était difficile de garder son sérieux rien qu'au doux nom de l'animal décédé, car elle connaissait l'attachement que Martin avait pour ses animaux.

- Je sais pertinemment que tout le monde se moque de moi, au ministère. Mais il faut me comprendre, j'suis tout seul. Mes animaux, c'est toute ma vie, ils sont toujours là pour moi... Ça peut paraître ridicule, mais ça ma réellement touché. Ça plus le fait que je suis toujours le premier à être là pour toutes les missions où il faut des volontaires.

Aby posa doucement sa main sur le bras de Martin dans un geste de réconfort. Il était attendrissant, et la jeune femme compatissait car elle savait que Calum n'était pas le style de patron à épargner ses employés, alors un type gentil comme Martin se faisait forcément exploiter.

- Si t'arrêtais un peu de dire tout le temps oui à tout ce qu'on te demande aussi... , remarqua la jeune femme.

- J'aurais mieux fait d'accepter les actions que m'a proposé mon père il y a cinq ans dans son entreprise. La vie serait beaucoup plus simple.

Jusque-là elle était restée douce et indulgente, mais à la dernière phrase de Martin elle décida qu'il s'était assez apitoyé sur son sort. Il fallait le secouer un coup, et elle allait s'en charger !
Lui arrachant le croissant des mains, elle le pointa sur lui tout en prenant un ton réprobateur.

- Ah non alors ! Et pourquoi pas retourner en France pendant que tu y es ? Martin, tu es fait pour être Auror, tu es bon dans ce job, pas pour jouer au financier dans une entreprise de chaudron ! Ne laisse jamais qui que ce soit te convaincre du contraire.

La jeune femme se releva alors du canapé et tendit sa main à son ami pour qu'il fasse de même. Le sourire de la sorcière était décidé et ne lui laissait pas le choix.

- Allez, finis de larmoyer. Le meilleur moyen de faire ton deuil, c'est d'allant de l'avant et de te bouger. Pour commencer, tu vas me faire le plaisir de jeter ce peignoir au feu, on dirait un grand-père.

Sans s'embarrasser des convenances, Aby se dirigea vers la chambre du sorcier français et ouvrit son armoire. Fouillant dans ses habits, elle en sortit une chemise et un pantalon passables qu'elle lança sur le lit.

- Tu n'as rien de plus seyant ? Tu as de sacré atouts, dit-elle en jetant un coup d'oeil au torse musclé de son ami, c'est dommage de ne pas en profiter.

Les épaules basses, l'air dépité, Martin écoutait Aby d'un air résolu. Il n'arrivait pas à relever la tête, c'était pitoyable... D'un air un peu éteint, il hochait la tête sans rien dire. C'était un peu pathétique...

Lorsqu'elle se leva pour chercher des vêtements qu'il pouvait se mettre, Martin entre ouvra la bouche pour dire quelque chose, mais rien ne sortait. Se levant quand même de son canapé, il suivit la jeune femme, d'un pas trainant. Elle commençait à retourner sa penderie, ce qui avait tendance à l'énerver légèrement, mais comme d'habitude, il ne disait rien. Étendant les vêtements sur son lit, elle lui demanda d'une, de brûler son peignoir, et de deux s'il n'avait rien de plus seyant à se mettre.

Levant les épaules Martin dit d'un air très légèrement agacé.

Bah non... Qu'est-ce que tu veux que je mette d'autre...? J'ai pas ton sens aiguisé de la mode, moi... Je met une chemise, un pantalon, des sous-vêtements, point. Tant que les couleurs semblent aller ensemble.

Tout en parlant, il enleva son peignoir, absolument pas gêné de se retrouver en caleçon face à Aby. Il l'avait toujours considéré un peu comme sa soeur, cela ne lui posait donc pas le moindre problème et il savait que ce sentiment était réciproque. Il n'y avait donc aucune ambiguïté entre eux.

Sa dernière réflexion lui fit hausser les sourcils. "Des atouts"? Qu'entendait-elle par là? Prenant son pantalon et l'enfilant tout en regardant la jeune femme d'un air assez interloqué, il lui dit.

De sacrés atouts ? Quels atouts ? Je suis pas différent des autres hommes, enfin je ne pense pas... Je... Je fais juste un peu de sport tous les jours, je cours beaucoup, je fais des exercices tous les matins, mais je ne pense pas que j'ai de "sacrés" atouts !

Attrapant sa chemise au passage, il commença à l'enfiler, ne pensant pas à la boutonner. D'un ai un peu détaché, il dit, toujours avec son air de chien battu.

Là... Comme ça c'est mieux ? Madame est-elle satisfaite ?

Martin ne semblait pas ravi de l'intrusion qu'Abigail opérait dans sa garde-robe, mais cette dernière ne s'en formalisa point. Avec le temps, elle en était venue à le considérer comme une sorte de petit frère un peu candide mais adorable, ce qui expliquait d'ailleurs qu'aucun des deux ne soit gêné qu'il se déshabille presque entièrement devant elle.

- "Tant que les couleurs semblent aller ensemble"...qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre ! Un peu plus de soin à ta tenue, et tu finirais peut-être par te trouver une femme.

Abigail savait qu'elle titillait la fierté du jeune homme, mais elle pensait réellement que son ami avait tout pour ne rester l'éternel célibataire qu'il était. Il fallait juste une petite impulsion, le petit truc qui réveillerait le séducteur qui devait bien dormir quelque part...caché...très au fond...

Croisant les bras et inspectant la marchandise, Abigail éclata de rire lorsqu'il s'étonna qu'elle lui trouve de sacré atouts. Une vraie ingénue, ce Martin ! Puis quand il lui demanda en français si elle était satisfaite, elle secoua la tête d'un air sévère.

- Non, il y a encore du travail...beaucoup de travail !

Elle s'approcha de lui et toucha de son doigt chacun de ses abdominaux, les uns après les autres, avec un clin d'œil mutin.

- Ca, ça, ça, ça, ça, ça, ça et ça ! Les voilà tes atouts, mon cher. Je peux t'assurer que tous les hommes ne possèdent pas d'aussi séduisantes plaques de chocolat. Regarde Cal, par exemple, il n'a pas ta carrure, mais il la compense avec l'assurance dont tu manques.

La diplomate était directe, elle n'allait pas tourner autour du pot alors que son ami avait besoin d'être secoué, même si elle devait blesser un peu son amour-propre. En avait-il seulement une once, de toute façon, étant donné qu'il se laissait constamment marcher dessus ?
Elle ferma sa chemise un bouton après l'autre, puis ébouriffa la chevelure déjà en bataille de Martin et tenta de la coiffer un tant soit peu, en continuant son énumération des points forts du sorcier.

- Tu es souriant, c'est déjà ça. L'Auror ténébreux et mystérieux c'est pas ton rayon, il faut donc jouer sur le côté mignon, attentionné et rassurant. Il faudrait arranger ta coiffure aussi, tu n'as plus l'âge pour ce look d'adolescent négligé. Et puis tu es français, nom d'une pipe, utilise un peu ça à ton avantage ! Les petites anglaises adorent les frenchies, c'est bien connu.

L'irlandaise eut soudain une idée pour vraiment lui rentrer dedans un bon coup. Cela n'allait sûrement pas plaire à Martin, mais tant pis...au moins, cela le forcerait à sortir de chez lui.

- Bon ça suffit, aux grands maux les grands remèdes.

Sans crier gare, elle refit face à la penderie de l'Auror et s'empara d'un seul coup de toutes les guenilles qui ne lui semblaient pas digne d'y résider...c'est-à-dire presque toutes ! Elle les jeta au sol en tas et sortit sa baguette, qu'elle pointa dessus sans laisser au propriétaire le temps de protester.

- Incendio !

La quasi-totalité des vêtements du sorcier prirent feu sous l'effet du sortilège, petit bûcher sur lequel elle comptait bien faire disparaître symboliquement l'ancien Martin.

Martin contracta ses abdos lorsqu'Abigail les toucha, non pas pour les rendre plus seyants, mais parce qu'il était très chatouilleux. Relevant légèrement les bras comme pour se protéger, il ne pu s'empêcher de sourire lorsqu'Aby le compara à Cal. Ca c'est sûr qu'ils n'étaient pas fichus pareil... Mais c'est vrai que Martin n'avait aucune confiance en lui.

Tu crois que... Si... Si j'avais plus confiance en moi je...? Nan... Nonononon... Ca m'étonnerais que ce soit si simple...

Abigail reboutonnait sa chemise tout en énumérant ses qualités... Et ses défauts. En fait, Martin n'accordait aucune espèce d'importance à son physique. Il se regardait dans le miroir seulement le matin, lorsqu'il se brossait les dents, lorsqu'il se rasait... Mais ça n'allait pas plus loin. Jamais il ne se demandait s'il était beau aujourd'hui, jamais il n'essayait de voir s'il avait un quelconque potentiel de séduction. Alors les paroles d'Aby le choquaient presque. Personne ne lui avait jamais dit ça.

Q...Quoi mes cheveux ? Qu'est-ce qu'ils ont...? Tu... Tu crois qu'il faudrait que je les coupe...? Ou...

Mais il n'eut pas le temps de terminer sa phrase qu'Abigail fit quelque chose d'absolument incroyable qui le laissa comme deux ronds de flan. Elle mettait le feu à ses affaires... ELLE METTAIT LE FEU A SES AFFAIRES !!!!!!

NON MAIS CA VA PAS LA TETE ?! T'ES DEVENUE FOLLE OU QUOI ????

Martin posa ses deux mains sur ses cheveux, d'un air complètement affolé. Il sortait littéralement de ses gonds. Pointant sa baguette sur le feu qui ravageait sa penderie, il hurla

AGUAMENTI !!!!!!!

Il était tellement affolé que le sort le fit reculer de plusieurs pas tant l'eau qui jaillissait de sa baguette était fort. Il regarda le chantier, tremblant complètement, puis il regarda Abigail d'un air totalement choqué.

MAIS !!!! MAIS T'ES PAS BIEN ?! J'AI PLUS RIEN A ME METTRE !!! SAUF CE QUE J'AI SUR MOI !!!! QU'EST CE QUE JE VAIS FAIRE MAINTENANT ?!

L'affolement de Martin était assez drôle à voir. Évidemment qu'Abigail, assez douée en sortilèges, avait prévu d'éteindre le tour avant que cela ne mette le feu au reste de la pièce...mais il fut plus rapide qu'elle et fit sortir un jet un peu trop puissant de sa baguette. La jeune femme leva les bras pour se protéger des gouttes qui lui giclaient à la figure et les baissa lorsque son ami eut fini d'inonder sa penderie.

Au moins cela avait eu le mérite de le secouer, même si ce n'était pas exactement la réaction qu'elle voulait provoquer. Il tremblait et se prenait la tête dans les mains plutôt que de réagir, aussi elle s'approcha à nouveau de lui et l'empoigna par les bras pour le calmer.

- Calme-toi Martin, ce n'est pas un drame, je n'ai brûlé que ce que tu aurais dû jeter depuis longtemps ! Mais regarde, là en cet instant...quand on te fait ce genre de truc, quand on ne te laisse pas le choix...c'est EN COLÈRE qu'il faut que tu mettes. Paniquer ne t'amènera à rien, te fâcher en revanche... Bon, pas contre moi, moi il faut que tu m'écoutes.

Il ne fallait pas non plus que sa petite leçon se retourne contre elle.
Alors qu'il s'inquiétait de ce qu'il allait pouvoir porter désormais, elle lui fit un grand sourire triomphant.

- Du shopping ! On va te refaire ta garde-robe. Ce sera cadeau, je te le dois bien après la faveur - oui tu m'as bien comprise - que je viens de te faire en incendiant tes guenilles.

Ravie de son idée, elle alla reprendre sa veste au salon et le héla depuis l'entrée.

- Bon tu viens ? Je n'ai pas toute la journée non plus !

Elle vérifiait rapidement ce qui lui restait d'argent moldu et sorcier dans sa bourse, comptant bien user de la mode moldue qu'elle trouvait bien plus sophistiquée que celle désuète des sorciers. Cette petite sortie ravissait déjà Abigail rien qu'à l'idée, cela lui ferait le plus grand bien de s'occuper de quelqu'un d'autre pendant un moment. Et une séance shopping avec son cher français, cela ne pouvait être qu'amusant !
Avant de sortir, elle lui lança toutefois un regard sérieux.

- Tu es prêt à devenir un homme ?

Martin tremblait comme une feuille. Il n'y avait pas un seul nerf dans son corps qui n'était pas à vif. Il aurait pu faire le tour du quartier en courant et en hurlant, tant il était dans une état de panique palpable. Il se passait tantôt la main dans les cheveux, tantôt sur le menton, tantôt il posait ses mains surs ses hanches, sa baguette à la main. Ses grands yeux bleus étaient exorbités. Décidément, il n'arrivait pas à s'en remettre.

Il n'écoutait pas réellement Aby, tentant de trouver un contre-sort dans sa tête, mais rien ne venait, il était trop émoustillé pour ça. Il commençait à faire les cent pas dans la pièce, lorsque la jeune femme le fit légèrement sursauter lorsqu'elle prononça le mot "colère" plus fort que les autres. N'écoutant pas réellement la fin de la phrase et ses conseils "avisés", il lui répondit presque du tac au tac.

Je SUIS en colère !!!! T'as pas vue comment je tremble ?! T'es complètement folle !!!! COMPLETEMENT !!! Tu sais, m'obliger à faire un tri, ça aurait été plus rapide !

Il mimait la scène, faisant semblant d'empiler des vêtements les uns sur les autres tout en parlant. Ses mains tremblaient encore légèrement. Se redressant, il l'écouta un peu plus attentivement, tout en se mordant compulsivement les lèvres.

Ok... OK, je te suis ! Mais je te préviens, si je me retrouve habillé comme un clown, tu vas m'entendre ! Et arrête de infantiliser avec ce ton condescendant, s'il te plait !

Martin commençait à se rebiffer ? L'effet escompté aurait-il eu lieu...? Les mains dans les poches, il sorti de la pièce, un peu perdu dans son propre appartement. Il cherchait les clés, incapable de mettre la main dessus. Après avoir tourné en rond pendant une bonne minute, il finit par les retrouver... Sur la porte, à leur place. Attrapant les clés, il les brandit comme un trophée, un sourire nerveux au visage.

C'est bon... Je suis prêt... Bon ! On va où, espèce de blondasse pyromane?

Martin n'était que très rarement grossier. Pourtant, lorsqu'il parlait dans sa langue natale, il se permettait parfois quelques petites insultes bien senties...

Plus Martin s'énervait, et plus le sourire d'Aby s'agrandissait. Parfait ! C'était ça qu'elle voulait réveiller chez lui, cette réactivité qu'il n'avait pas habituellement et qui faisait qu'on lui marchait continuellement dessus.
Lorsqu'il la menaça dans le cas où il se retrouverait habillé comme l'as de pique, la jeune femme eut un soupir en levant les yeux au ciel. Elle lui répondit depuis le couloir, en haussant le ton pour qu'il l'entende pendant qu'il farfouillait elle-ne-savait-quoi.

- Fie-toi à mon "sens aiguisé de la mode", comme tu l'as toi-même dit avant. Je vais faire de toi un véritable Apollon !

La diplomate eut un rire lorsqu'il l'insulta en français en sortant de l'appartement de Martin. Le français faisait-il sa crise d'adolescence à 30 ans ? Mieux vaut tard que jamais ! Bon, ça allait 5 minutes, et elle voulait bien accepter quelques piques de ce genre si c'était le signe qu'il se révoltait un peu, mais elle n'allait pas se laisser faire non plus.

- Je préfère "sulfureuse déesse blonde", mon pigeon. Et aujourd'hui, ce sera "ô grande maîtresse" pour toi. Un peu de déférence pour la femme qui va t'apprendre à t'habiller !

Abigail avait répondu en français, ravie de pouvoir s'exprimer dans cette langue qu'elle appréciait, et trouvant qu'elle était adéquate pour une virée relooking.
La jeune femme les mena dans le Londres moldu dans le quartier de Mayfair, berceau de la mode onéreuse mais élégante, n'étant pas avare sur les moyens de transformer son cher ami. Elle passa rapidement le seuil d'une boutique pour hommes qui proposait des costards de luxe, Martin sur les talons.

- Voyons voir, il faut qu'on mette tes beaux yeux clairs en valeur.

La sorcière attrapa quelques vestes de costumes et les plaqua une à une contre contre le torse de Martin pour juger de l'effet et de la taille. Elle en reposa certaines, et conserva les plu seyantes selon elle. Finalement, elle fourra 3 complets pantalon-veste dans les bras de son disciple : un bleu, un gris clair, et un anthracite. Après y avoir ajouté des chemises de différents tons assortis aux costard, elle pointa d'un doigt autoritaire les cabines d'essayage au fond du magasin.

- Va déjà essayer ça, le temps que je te trouve un ou deux petits trucs en plus. Et je veux voir chaque tenue !

Puis elle retourna farfouiller dans les rayons, n'hésitant pas à demander à la vendeuse d'aller lui chercher des modèles particuliers en réserve.

Martin avait suivi Aby en traînant des pieds, les mains dans les poches, un air morose au visage. Il détestait faire les magasins. MAIS DETESTAIT VRAIMENT CA !!!!!

Une fois arrivés dans un magasin moldus, il regarda la jeune femme s'agiter autour de lui, allant d'un rayon à l'autre, alors que lui était planté comme un arbre. Il regardait parfois la vendeuse qui lui jetait un air un peu perplexe alors que lui, gêné, lui souriait en lui faisant un petit signe de la main. Il vit alors la vendeuse lever les yeux au ciel et faire demi-tour à l'opposé.

Regardant de nouveau Aby d'un air vraiment perdu, comme si elle s'apprêtait à réaliser une potion vraiment très complexe, on aurait dit qu'il ne savait plus quoi faire de ses bras. Les croiser? Mettre ses mains dans ses poches ? Derrière son dos ? Une fois qu'elle fut revenue à son niveau, elle lui colla dans les bras une TONNE de vêtements.

Quoi TOUT CA ?! Mais ça va nous prendre la journée !!!!

Mais la jeune femme était déjà repartie dans l'autre sens. Soupirant fortement, il entra dans une cabine d'essayage et sursauta en tombant nez-à-nez avec son reflet. Soupirant de nouveau, il essaya la première tenue. S'en était, bête à mettre, ces trucs là ! Alors qu'il pestait contre son amie dans sa cabine, il sorti, faisant face à une Aby assise à côté d'une seconde pile de vêtements.

Martin était métamorphosé, on ne reconnaissait à peine. D'ailleurs la vendeuse qui l'avait snobé quelques minutes plus tôt, le regardait bouche bée. Ecartant les bras, l'air plus morose que jamais, il dit à Abigail.

Bon... Ca te va comme ça ?! T'as pas l'intention de me faire tout essayer ?! T'es sérieuse là ?!

Aby avait fini de faire le tour du magasin et sélectionné d’autres modèles à faire essayer à Marin.
Elle l’entendait pester contre elle alors qu’elle s’asseyait sur l’un des canapés disposés près des cabines d’essayage, une montagne de gilets, chemises, pantalons posés à ses côtés. Si Martin semblait vivre un vrai calvaire, elle en revanche s’amusait beaucoup. Abigail était une femme coquette, qui prenait grand soin de son apparence car elle savait qu’elle constituait une arme de choix. Avec Martin, elle avait matière à faire pareil, si celui-ci voulait bien y mettre un peu sien…

- C’est bon, tu t’en sors ? C’est pas si compliqué d’enfiler un costard quand même, ne me dis pas que je vais devoir aussi boutonner ta chemise !

Il lui avait dit de ne pas le traiter comme un gamin, et elle en rajoutait une couche pour le taquiner. Il était tellement mignon quand il se mettait en rogne.
Finalement, un homme élégant et d’une classe folle sortit de la cabine de l’Auror. Si la vendeuse malpolie était bouche bée devant cette transformation, c’est un immense sourire satisfait qui s’étira sur les lèvres de la diplomate. Elle ne s’était pas trompée, Martin avait de quoi mettre à ses pieds toute la gente féminine londonienne. La transformation était époustouflante !

- Waouw…mon chou, tu es MA-GNI-FI-QUE ! s’exclama Aby en s’emparant d’un gilet sur la pile à côté d’elle. Il manque juste la touche finale.

Prenant le veston du complet que portait Martin par le col, elle l’en débarrassa et l’aida à enfiler le gilet, puis repassa devant lui pour rapidement fermer les quelques boutons et s’éloigna pour juger du résultat, validant la tenue avec un hochement de tête appréciateur.

- Parfait, tu as une classe folle. Regarde-toi un peu dans le miroir et ose me dire que tes vieilles frippes valaient mieux que cette tenue.

La sorcière blonde était convaincue d’avoir fait le bon choix en brûlant les affaires de Martin, mais elle estima qu’un avis secondaire pour l’appuyer ne serait pas superflu.

- Mademoiselle !, héla-t-elle et la vendeuse s’approcha d’eux, Est-ce que vous coucheriez avec cet homme ?

Abigail adorait provoquer son ami, et elle savait qu’une telle question à son propos aurait le don de créer une réaction amusante. C’est donc avec un ton très sérieux qu’elle l’avait posée et qu’elle regardait la jeune moldue, qui méritait elle aussi d’être embarrassée pour son comportement méprisant d'auparavant. Après avoir fermé et ouvert la bouche deux fois, la vendeuse jeta un coup d’œil appréciateur à l’Auror et finit par trancher.

- Oui. fusa assez spontanément, avant d’être tempéré, Mais, euh, enfin, n’allez pas croire que j’ai des vues sur votre mari, Madame.

- Ce n’est pas mon mari. Veuillez nous amener quelques cravates maintenant., répondit Aby en congédiant sans ménagement la jeune fille confuse.

La question que posa Aby le gêna tellement qu'il senti son teint devenir parfaitement livide. Il avait bien entendu ?! Mais la réponse de la jeune vendeuse le laissa comme deux ronds de flan. Quoi elle avait vraiment dit "oui"?! Non, Martin était sûr que son amie lui avait versé de l'argent en douce, c'était obligé. C'est donc d'un air outré qu'il s'exclama.

Abigail !!!

Mais la jeune vendeuse était déjà repartie, l'air confus, chercher des cravates sur ordre du tyran blond qu'était Aby.

Non mais t'es pas un peu malade ?! Dire ça, comme ça ?! Et si elle avait dit "non", hein ?!

Martin se regarda alors dans une glace, sur ordre d'Aby. Il haussa les épaules et, hochant légèrement de la tête, il fini par acquiescer.

Moui... Oui tu as raison... Mais tu as quand même brûlé un pull que m'avait tricoté ma mémé !!!!!! Elle me l'avait envoyé tout spécialement pour la convention sur les animaux domestiques la semaine prochaine, et il avait un boursouflet de dessiné dessus !!!!

Non mais alors quoi !!!!! Il fallait connaitre ses priorités !!!! Martin avait promis d'animer le stand consacré aux petites boules roses, et maintenant il aurait l'air de quoi ?! D'un représentant en croquettes !!! Mais nooooon, madaaaaame avait décidé de tout brûler à l'aveuglette !!!

Se regardant encore dans la glace quelques instants, il se tourna ensuite vers Aby et, une petite moue au visage, il demanda sur le même ton qu'un enfant à qui on aurait interdit quelque chose.

J'suis obligé d'essayer le reste...?

Abigail haussa les épaules lorsque Martin lui demanda ce qu'elle aurait fait si la vendeuse avait répondu non à sa question.

- Cela aurait été une menteuse.

Finalement, le jeune homme sembla commencer à se ranger à son avis en se mirant dans la glace : la première leçon de vie de Martin était prometteuse ! Il ne lui épargna toutefois pas le chapitre sur le pull tricoté par sa grand-mère, et qui avait subi le même traitement que tout ce qu'Aby avait jugé immettable dans son armoire. La diplomate était patiente, mais Martin ne lui facilitait pas la tâche : il était temps qu'il annonce à sa grand-mère qu'elle pouvait ranger ses pelotes.

- Alors, leçon numéro 2 : ne parle ni de cette convention ni des pulls tricotés par ta grand-mère devant une autre femme. Parce que tu viens de perdre tous les points de séduction que le costard t'avait fait gagner.

Abigail eut un petit soupir : elle avait du pain sur la planche, si elle décidait de transformer Martin en homme fatal. Sachant qu'ils y passeraient encore un moment, elle se rassit sur le canapé et hocha de la tête et en adoptant un ton ferme.

- Oui, tout. Et que ça saute !

Alors que son ami obéissait contre son gré, la vendeuse revint avec les cravates demandées par Aby, et ne s'attarda pas près de la diplomate car elle ne désirait pas être la victime d'une nouvelle question gênante.
Sans plus de cérémonie, la sorcière rejoignit Martin dans sa cabine et compara les couleurs des cravates pour en choisir une assortie à la chemise qu'il venait d'enfiler, puis elle la lui passa autour du cou.
Elle profita de la relative intimité offerte par la cabine pour poser une question essentielle à Martin...choisissant, pour le mettre plus à l'aise, de la poser en français.

- Dis-moi, t'as eu combien de partenaires dans ta vie en tout ?

La jeune femme savait pour la seule relation important qu'il avait connue...mais elle se disait que depuis, il avait quand même dû avoir au moins quelques aventures.

Et voilà que maintenant, elle le rejoignait dans la cabine ! Elle voulait pas non plus le border dans son lit avant de dormir non plus? Qu'est-ce qu'elle était envahissante !!! Et puis cette question, sortie de nulle part... Martin leva les yeux au ciel en soupirant et regarda de nouveau Aby l'air blasé.

J'ai eu une copine pendant un peu plus d'un an, tu le sais, ça ! C'était une copine à toi ! Mais ça dépend...

Il esquissa alors un petit sourire un peu pervers et, levant et baissant les sourcils, il ajouta, toujours en français dans le texte.

Ma main droite, ça compte...?

Il se mit à rire tout seul de sa blague qu'il n'aurait jamais osé faire en anglais, bien entendu ! Mais elle méritait bien cette réponse ! Sa curiosité était plus qu'énervante.

Et toi, j'te demande combien de mecs sont passés dans ton lit ? Je suis sûr que t'as pas assez de doigts tes mains et tes pieds réunis !

Comment ça, il changeait de sujet ? Pas du tout ! Il allait justement y revenir ! Arrêtez d'être médisants comme ça, c'est pénible, à la fin...

Je n'ai pas eu d'autre expérience depuis Hannah. Alors oui, je sais, c'est peu, mais je n'ai pas... Le temps pour ça ! J'ai autre chose à faire, mon boulot me prend un temps fou... J'suis sûr que je serais incapable de draguer, de toute façon...

Martin soupira avant de relever la tête tout en haussant les épaules. Life is Life, comme disaient ces gens étranges que sont les anglais.

Alors qu'elle attachait la cravate de Martin, Abigail eut droit à une blague vaseuse en français et elle l'en punit en serrant d'un coup le noeud de cravate près du cou du jeune homme.

- Ha ha, très drôle. répondit-elle sur un ton blasé. Je te rappelle que j'ai épousé Cal à 18 ans, brealsún.

Elle venait gentiment de le traiter d'idiot en irlandais. Allons, il fallait qu'elle se reprenne sinon la mauvaise humeur de Martin allait déteindre sur elle.

- Elle te plait celle-là ? Je trouve qu'elle donne mieux que la grise. commenta-t-elle à propos de la cravate.

La diplomate s'écarta légèrement pour que son ami puisse s'admirer, tout en l'écoutant expliquer que....que ça faisait 8 ans qu'il n'avait pas eu de relations sexuelles ?!!! La nouvelle lui fit ouvrir de grands yeux ronds de surprise.

- Quoi ?! Mais attends...ça fait 8 ans ! Rien ? Même pas un coup d'un soir, une aventure sans lendemain ?

Abigail était atterrée. A ce niveau là ce n'était plus être pas doué, c'était carrément donner dans la carrière de moine ! Elle n'osait même pas imaginer la frustration qu'il avait dû accumuler...sa main droite comme il le disait, ça allait quelques temps, mais il ne fallait pas abuser ! Ca ne remplaçait pas tout ce qu'une femme pouvait lui faire...ou un homme. L'Irlandaise commençait à se demander s'il n'y avait pas une raison au célibat endurci de Martin.

- Dis donc...tu ne serais pas gay, par hasard ? demanda-t-elle de but en blanc, avant d'ajouter un clin d'oeil, Je ne te juge pas, mais du coup ça m'étonnerait moins que ton excuse du boulot pour justifier ton désert affectif et sexuel.

Quoi qu'il en soit, Abigail ne pouvait pas laisser son ami s'enfoncer dans une pareille solitude. Elle avait décidé de le sortir de chez lui pour le bouger, elle n'allait pas s'arrêter en plein milieu du chemin.

- Je vais t'apprendre moi, tu vas voir c'est pas si difficile de séduire une femme. Je t'apprends déjà à t'habiller, je ne suis plus à ça près...

Et elle comptait bien qu'il lui paye un restaurant dès qu'il aurait fait sa première conquête !

Martin leva les yeux au ciel pour au moins la centième fois ee la journée. Preuve de son agacement presque constant quant aux questions que lui posait Aby, il finit par lui répondre avec un détachement déconcertant.

Ah lala... Aby... tu m'as démasqué. D'ailleurs il faut que tu saches qu'à chaque fois que tu pars en déplacement, Cal et moi on s'envoie en l'air ensemble.

Il regarda la jeune femme avec un air blasé au possible. A priori la seule personne sur cette planète à ne pas croire Martin homosexuel... C'était lui-même. L'air un peu outré, ou du moins PERPÉTUELLEMENT outré, il ajouta.

BIEN SÛR que j'aime les femmes, quelle question ! Et pourquoi toi aussi tu me demande ça ?! On dirait ma mère ! Tu lui as parlé il y a peu, hein ? Avoues. Elle t'a envoyé un hibou, cette vieille chouette ! Qu'elle s'occupe de ses affaires celle-la, oh lalaaaa...! Moi... gay ! J'vois vraiment pas pourquoi, hein...comme si j'étais maniéré.... humpf !

Il avait bien entendu ponctué ses paroles de gestes. Et maintenant, il allait devoir se justifier....

Je vois pas ce qu'il y a de mal à être sensible ! On n'est pas tous obligés d'être des mâles en manque constant de sexe pour être un homme, bordel ! Oui, j'ai rien fait depuis huit ans , mais je n'ai ni trouvé ni cherché une jeune femme pour combler ce vide ! Excuses moi d'être un peu plus que ça ! Bon on peut y aller maintenant ? J'étouffe...

Martin changeait de sujet subtilement tout en ayant conscience que son amie ne se laisserait pas attendrir aussi facilement. Après tout, elle était douée pour lui bouger les fesses et ses états d'âme n'auraient vraisemblablement aucun effet sur elle.

Abigail éclata de rire lorsque Martin prétendit qu'il avait des relations charnelles avec Calum : connaissant Calum, macho-man en personne, c'était extrêmement difficile à croire.

- J'en étais sûre, j'ai toujours trouvé qu'il te regardait avec envie ! Et puis mieux vaut toi qu'une de vos jeunes secrétaires.

La jeune femme commençait à donner dans le même humour que Martin, espérant qu'il arrêterait de bouder comme ça. Pour elle, il était inimaginable que Cal la trompe ; certes, leur relation n'était pas au beau fixe et elle-même ne se gênait pas depuis que leur libido avait pris des vacances prolongées, mais Cal ? Non, impossible ! Il lui était loyal, elle en était certaine.
Mais là n'était pas le sujet ! Pour le moment, elle se concentrait sur le relooking de ce cher Martin, et sa vie amoureuse, et sexuelle, et lui faire oublier sa solitude,...ça faisait beaucoup, dis donc !

Le doute sur son orientation sexuelle sembla fortement lui déplaire, car il se lança dans des explications indignées. La diplomate leva les mains en l'air en signe de paix.

- D'accord, d'accord, du calme. Ça va, c'est pas un drame qu'on se pose la question. Oui, j'avoue, ta mère m'a écrit la semaine passée...je comptais te le dire, mais on n'a pas vraiment eu le temps de se voir toi et moi. Elle voulait s'assurer que tu avais bien reçu son invitation pour Pâques comme tu ne lui as pas répondu, espèce de fils indigne.

Aby avait fait la connaissance de la mère de Martin lors d'un séjour en France, et les deux femmes s'étaient merveilleusement bien entendues, l'Irlandaise adorant le franc parlé mêlé cassant un peu la classe de la sorcière française. Autant dire que le pauvre Martin avait dû endurer de longues conversations durant lesquelles les deux autres dissertaient sur lui.

La jeune femme écouta le laïus de Martin sur le fait qu'il ait la vie sexuelle d'un jeune séminariste se préparant à entrer dans les ordres, lui lançant un regard qui en disait long.

- J'ai pas dit que tu devais te lancer dans une collection de conquêtes féminines, mais tu l'as dit toi-même chez toi...tu es seul, et au final tu combles ce vide affectif avec des animaux.

Quand il demanda s'ils pouvaient y aller, elle hocha la tête mais ne comptait en rester là. Oh non, elle n'en avait pas fini avec lui ! Elle repassa de l'autre côté du rideau pour le laisser se changer, et quand il l'eut rejointe elle s'empara des vêtements qu'elle avait sélectionné tout en discutant avec lui, et alla à la caisse les payer.
Ils sortirent du magasin moldu et elle lui tendit les sacs remplis de nouvelles tenues parfaites pour enfin donner au corps de Martin la classe qu'il méritait, et elle s'engagea dans une rue transversales pour le mener à la seconde étape.

- Ah non, on en a pas encore fini pour aujourd'hui, j'ai encore 3h devant moi et je compte bien en faire bon usage. Allez, tu me suis et t'arrêtes de tirer la tête maintenant. Promis, je ne te ferai plus rien essayer, mais il y a autre chose de primordial à changer dans ton apparence négligée.

La belle sorcière les mena cette fois dans un salon de coiffure huppé, enseigne où elle avait ses habitudes, et elle confia son protégé aux mains expertes de la gérante du lieu.

- Je te fais confiance, Isabella. Il faut qu'il soit canon.

En attendant, elle-même en profita pour se faire cajoler les cheveux par un autre employé, s'en tenant au shampoing et brushing, et elle revint vers Martin alors qu'Isabella lui ébouriffait la tignasse au sèche-cheveux.

- J'ai hâte de voir le résultat. commenta-t-elle avec un grand sourire, n'ayant jamais été déçue par la coiffeuse.

ENFIN ils sortaient. Il préféra ne pas relever la remarque d'Aby quant à l'absence de réponse de Martin à l'invitation de sa mère et enfin ils purent sortir du magasin. Il inspira profondément l'air londonien qui lui avait manqué, aussi court l'heure passée avait-elle été. Mais où allait-elle encore l'emmener ?!

Il n'avait rien à dire de plus quant à sa chasteté plus ou moins imposée, que pouvait-il ajouter, après tout ? Et puis il avait beau avoir passé une année avec Hannah, ils n'avaient pas pour autant passé leur vie au lit et, peut-être était-ce à cause du manque certain d'engouement de son ex pour le sexe qu'il n'en avait pas d'excellents souvenirs. Mais il n'était pas non plus contre l'idée d'apprendre, après tout il n'allait peut-être pas rester célibataire toute sa vie !

Lorsqu'ils arrivèrent devant le salon de coiffure, le soupire de Martin fut si fort qu'on aurait presque pu penser que c'était de la stupeur. Lorsqu'il s'assit et lorsqu'il se retrouva face à ladite Isabella, il eut du mal à déglutir. Il n'apportait aucune espèce d'importance à sa coiffure, mais il fallait avouer que des cheveux avaient tendance à être assez longs ces derniers temps... Et complètement informes. Quand à sa barbe... N'en parlons pas. D'autant que la déprime n'avait pas réellement aidé.

Il devait avouer que se faire bichonner était bien plus agréable que de supporter les changements de vêtements. Il ne vit même pas le temps passer ! Au bout d'un moment, Aby revint vers lui et, alors qu'Isabella lui montrait le résultat, Martin souriait. Il avait les cheveux coiffés en arrière de manière un peu négligée et avait la barbe bien taillée. Il était tout simplement métamorphosé.

Alors... J'ai l'air de quoi ?

Abigail eut un sourire jusqu'aux oreilles en découvrant la métamorphose de Martin. Ce n'était pas le même homme que celui qui lui avait ouvert la porte dans son peignoir immonde ce matin. Il était d'un charme fou, et nul doute que ses nouveaux vêtements achèveraient la transformation.
Elle se pencha en avant et plaça son visage à la même hauteur que celui de son ami, le regardant à travers le reflet du miroir.

- D'un homme prêt à conquérir le monde. répondit-elle avec un clin d'oeil.

Elle se redressa et fit la bise à Isabella en la remerciant, avant de la payer pour ce travail si bien accompli.
La diplomate et l'auror sortirent sur la rue commerçante et la jeune femme jeta un coup d'oeil à une horloge. Il était bientôt temps de retourner au bureau, mais elle avait encore le temps de sa pause-déjeuner.

- J'ai faim. Je t'invite pour des sushis et je retourne au boulot. Franchement, avec tout ça, t'auras intérêt à me faire un super cadeau d'anniversaire.

Aby était d'une humeur guillerette, le porte-monnaie allégé et le coeur également. S'être occupée de Martin toute la matinée lui avait changé les idées et l'avait grandement amusée. Et puis c'était son meilleur ami, il méritait bien qu'elle ne le laisse pas se morfondre sur lui-même.
La belle sorcière prit le bras de Martin qui ne tenait pas les sacs, et ils se dirigèrent tranquillement vers un restaurant, tandis qu'elle lui donnait quelques conseils de séductions avisés.